FAQ sur la JUB
1/ Qu’est-ce que le brevet à effet unitaire (ou « brevet unitaire ») ?
Il s’agit d’un brevet européen conférant une protection uniforme et unique dans les Etats membres de l’Union européenne participant à une coopération renforcée (Articles 3 et 7 Reg(UE) 1257/2012) et ayant ratifié l’Accord relatif à une Juridiction unifiée du brevet (AJUB).
Ce brevet européen est délivré par l’OEB selon les règles et procédures inchangées de la CBE.
L’effet unitaire est attribué après la délivrance du brevet européen sur demande du titulaire du brevet européen et pour le territoire des Etats membres de l’Union participant à la coopération renforcée et ayant ratifié l’AJUB à la date d’inscription de l’effet unitaire par l’OEB.
2/ Comment demander l’effet unitaire du brevet ?
Les conditions pour demander l’effet unitaire sont définies par la règle 6 du règlement d’application relatif à la protection unitaire (RPU).
Le titulaire du brevet doit présenter la demande d’effet unitaire auprès de l’OEB, dans la langue dans laquelle le brevet a été délivré, dans un délai non prolongeable d’un mois après la publication de la mention de délivrance du brevet européen.
La demande doit préciser le numéro du brevet européen, l’identification du titulaire et, le cas échéant, l’identification du mandataire. Il faut fournir également, dans le même délai, une traduction du brevet en anglais si le brevet a été délivré en français ou allemand, ou dans une autre langue officielle de l’Union si le brevet a été délivré en anglais.
Aucune taxe n’est due pour la demande d’effet unitaire.
Il est recommandé d’utiliser le formulaire UP 7000 de l’OEB.
3/ Qui peut déposer une demande d’effet unitaire ?
La demande d’effet unitaire doit être déposée par le titulaire du brevet européen (règle 5(1) RPU).
Le titulaire peut se faire représenter. Le régime applicable à la représentation est le même qu’en vertu de la CBE (règle 20 RPU ensemble article 133 CBE).
4/ Est-il possible de ne pas bénéficier de l’effet unitaire du brevet ?
Pour ne pas bénéficier de l’effet unitaire, il suffit de valider le brevet européen de manière classique, devant chacun des offices nationaux concernés.
Il est à noter que les deux systèmes peuvent coexister avec l’effet unitaire pour les Etats participants et les validations classiques pour les autres (par exemple pour le Royaume-Uni).
5/ Quels sont les intérêts à ne pas demander l’effet unitaire du brevet ?
Par exemple :
- Si la protection est recherchée uniquement ou principalement dans des Etats dans lesquels l’effet unitaire ne peut être obtenu (Suisse, Royaume-Uni, Espagne…).
- Si la protection n’est recherchée que dans un petit nombre d’États de sorte que le maintien en vigueur du brevet avec l’effet unitaire paraîtrait trop coûteux en comparaison avec le maintien en vigueur des validations classiques dans ces États.
- S’il a été détecté un droit antérieur national gênant dans l’un des Etats membres de l’Union participant à la coopération renforcée ou si la désignation de l’un de ces Etats a été retirée (en effet, pour obtenir l’effet unitaire, il faut obligatoirement avoir désigné les Etats membres de l’Union participant à la coopération renforcée et avoir les mêmes revendications pour ces Etats).
- En cas de volonté d’échapper à la compétence de la Juridiction unifiée du brevet (JUB) - il faudra néanmoins notifier une décision d’opt-out sur le brevet européen.
- Si plusieurs titres nationaux indépendants (que l’on peut céder et gérer indépendamment les uns des autres) sont préférés à un seul brevet unitaire monobloc.
6/ Quelle est la portée territoriale d’un brevet à effet unitaire ?
(Cartes issues de epo.org)
A terme, un brevet européen à effet unitaire pourrait couvrir les 25 Etats de l’Union européenne participant à la coopération renforcée (c’est-à-dire tous les Etats membres de l’Union européenne, sauf l’Espagne et la Croatie, qui pourraient éventuellement rejoindre la coopération plus tardivement - cf. plus loin).
Figure 1 - Etats participant à la coopération renforcée
A son lancement, le brevet européen à effet unitaire ne couvrira, parmi ces 25 Etats, que ceux ayant également signé et ratifié l’AJUB : 17 actuellement (Allemagne, Autriche, Belgique, Bulgarie, Danemark, Estonie, Finlande, France, Italie, Lettonie, Lituanie, Luxembourg, Malte, Pays-Bas, Portugal, Slovénie et Suède).
Figure 2 - Etats participant à la coopération renforcée et ayant ratifié l'AJUB lors de son lancement
Au fur et à mesure des nouvelles ratifications, les brevets européens à effet unitaire auront une portée territoriale plus étendue que les précédents. En effet, la portée territoriale d’un brevet européen à effet unitaire est définie par les Etats faisant partie du système au moment de l’inscription de l’effet unitaire du brevet européen par l’OEB.
7/ Que se passe-t-il à la délivrance d’un brevet européen pour les pays désignés ne pouvant pas bénéficier de l’effet unitaire (pays non-membres de l’UE ou ne participant à la coopération renforcée ou n’ayant pas ratifié l’AJUB, ex : Suisse, Espagne ou Pologne) ?
Pour obtenir une protection dans ces pays, il faudra y valider le brevet européen de manière classique et acquitter les annuités auprès des offices nationaux concernés. En d’autres termes, le brevet européen pourra comprendre deux parties :
- une « partie unitaire » pour les Etats participant à la coopération renforcée et ayant ratifié l’AJUB à la date d’inscription de l’effet unitaire par l’OEB (sous réserve de faire la demande d’effet unitaire) ; et
- une « partie classique », laquelle se décomposera en autant de sous-parties que de pays ne pouvant pas bénéficier de l’effet unitaire pour lesquels les procédures de validation auront été réalisées.
8/ Les Etats membres de l’UE ne faisant pas partie de la coopération renforcée ou n’ayant pas signé l’AJUB pourront-ils rejoindre ultérieurement le système du brevet unitaire s’ils le souhaitent ?
Un État membre de l’UE a la possibilité de rejoindre la coopération renforcée, comme l’a fait l’Italie qui n’en faisait pas partie à l’origine. Cette possibilité est donc ouverte à l’Espagne et à la Croatie ou à tout État qui serait nouvellement admis dans l’UE.
Pour que l’effet unitaire d’un brevet s’applique dans un tel État, ainsi qu’en Pologne, une condition supplémentaire à remplir est la signature puis la ratification de l’AJUB.
9/ Quel est le régime de paiement des annuités d’un brevet unitaire ?
Le régime des taxes est défini par le règlement relatif aux taxes pour la protection unitaire (RRT-PBU).
Une seule taxe annuelle doit être acquittée auprès de l’OEB pour tous les pays bénéficiant de l’effet unitaire.
Elle est due le dernier jour du mois de la date anniversaire du dépôt du brevet européen, étant entendu qu’un délai supplémentaire de 6 mois permet de payer la taxe avec une surtaxe de 50%.
Montant :
10/ Comment invalider un brevet unitaire ?
La procédure d’opposition devant l’OEB existante, s’appliquant déjà aux brevets européens classiques, demeure et sera utilisable pour les brevets européens à effet unitaire. Cette procédure peut être initiée par toute personne à l’exception du titulaire du brevet.
En outre, une procédure centralisée de révocation devant la JUB est instaurée. Cette procédure pourra être demandée à titre principal par toute personne concernée ou à titre reconventionnel.
Ces deux procédures engendreront des conséquences (maintien en vigueur sous forme limitée, révocation ou annulation, etc.) qui s’appliqueront à l’ensemble des Etats dans lesquels le brevet européen à effet unitaire produisait ses effets, c’est-à-dire les Etats participant à la coopération renforcée et ayant ratifié l’AJUB à la date d’inscription de l’effet unitaire par l’OEB.
11/ Quelles sont les différences, au niveau des différentes procédures, entre un brevet européen classique et un brevet européen à effet unitaire ?
Avant la délivrance :
Après la délivrance :
12/ Qu’est-ce que l’opt-out ? Quel sont ses effets ?
L’opt-out est une option permettant à un titulaire d’un brevet européen sans effet unitaire (c’est-à-dire un brevet européen « classique ») ou un demandeur d’une demande de brevet européen publiée de déroger à la compétence exclusive de la JUB.
Cette option peut être exercée pendant une période transitoire de sept ans (qui sera éventuellement prolongée de sept années supplémentaires). Pour un litige impliquant un brevet européen pour lequel la dérogation a été notifiée, les tribunaux nationaux seront compétents (article 83 AJUB). A l’issue de la période transitoire, les brevets européens qui n’auront pas fait l’objet d’un opt-out pendant la période transitoire relèveront de la compétence exclusive de la JUB.
13/ Faudra-t-il faire un opt-out pour chaque pays où le brevet européen a été validé ?
Non, la procédure d’opt-out est centralisée. Elle vise un brevet européen sans effet unitaire ou une demande de brevet publiée dans son entièreté et ce choix est donc applicable à l’égard de tous les Etats membres contractants de l’AJUB. Il est ainsi inutile de confirmer le choix d’opt-out à chaque nouvel Etat qui rejoint l’AJUB (règle 5 des règles de procédure).
14/ Quand peut-on demander un opt-out ?
Il est possible de demander un opt-out une demande de brevet européen, dès lors que celle-ci a été publiée, ou pour un brevet européen, même après son expiration.
L’opt-out peut être demandé à partir de 3 mois avant l’entrée en vigueur de l’AJUB – c’est-à-dire pendant la période appelée « Sunrise period », et au plus tard 1 mois avant la fin de la période transitoire initialement fixée à 7 ans (Article 83.1 et 5 AJUB).
L’opt-out ne sera pas effectif si une action a déjà été engagée devant la JUB, par le titulaire ou par un tiers (Article 83.3 AJUB).
15/ Comment demande-t-on un opt-out ?
Auprès du Greffe de la JUB.
Le titulaire peut se faire représenter par toute personne, notamment par un représentant habilité tel qu’un avocat ou un mandataire en brevets européens possédant les qualifications appropriées. Il n’est pas exigé de pouvoir.
Dans une demande d’opt-out, il faut :
- nommer et fournir l’adresse de chaque titulaire ou déposant ;
- nommer et fournir l’adresse de toute personne représentant le titulaire ou le déposant aux fins de la demande d’opt-out ;
- identifier le brevet ou la demande avec notamment son numéro de publication ;
- dans le cas d’un CCP, l’identifier avec notamment son numéro ;
- si la personne présentant la demande d’opt-out n’est pas le titulaire officiellement inscrit, fournir une déclaration que cette personne est bien propriétaire de la demande ou du brevet européen.
Il sera possible de notifier des décisions d’opt-out de manière groupée pour plusieurs brevets ou demandes de brevet, par le système CMS proposé pour s’interfacer au Greffe.
Aucune taxe n’est perçue par le Greffe pour enregistrer une décision d’opt-out.
16/ Le Greffe de la JUB examinera-t-il les demandes d’opt-out avant de les enregistrer ?
Il n’est pas prévu que le Greffe examine les demandes d’opt-out avant de les enregistrer.
Toute erreur pourra donner lieu à des contestations dans l’éventualité d’un litige ultérieur, pouvant entraîner qu’une juridiction nationale saisie se déclare incompétente, ou encore que la JUB se déclare compétente en dépit de la tentative d’opt-out du titulaire.
En cas d’erreur dans une demande d’opt-out, il appartient donc au titulaire de la détecter et de procéder à la correction.
17/ Qu’est-ce que la « Sunrise period » ?
Il s’agit de la période couvrant les 3 mois juste avant l’entrée en vigueur de l’AJUB, prévue pour faire face au risque que des personnes se précipitent pour demander à la JUB la révocation de brevets de tiers sur une large étendue territoriale. Durant cette période, les titulaires de brevets européens pourront déjà notifier au Greffe leurs décisions d’opt-out et éviter ainsi d’être pris de vitesse par une action en révocation opportuniste de la part d’un concurrent.
18/ Est-il possible de demander un opt-out pour un brevet le jour même où une action concernant ce brevet est engagée ?
Le texte (Article 83.3 AJUB) exclut l’opt-out si une action a déjà été engagée devant la JUB pour le brevet ou la demande de brevet en question.
Il ne se prononce pas sur le cas particulier où la date de notification au Greffe de la JUB d’une décision d’opt-out coïnciderait avec celle où une action engagée par un tiers devant la JUB concernant le même brevet.
19/ En l’absence d’opt-out, un brevet européen peut-il être invoqué dans une action engagée devant une juridiction nationale ?
Oui, pendant la période transitoire (période de 7 ans à compter de l’entrée en vigueur de l’AJUB, qui peut être prolongée jusqu’à 7 ans supplémentaires) (Article 83.1 AJUB).
A l’issue de la période transitoire, cette option ne sera plus disponible.
20/ Qui peut demander l’opt-out d’un brevet européen ? Que se passe-t-il en cas de copropriété du brevet ?
L’opt-out est demandé par le titulaire effectif, ou son représentant, à la date de la demande d’opt-out.
Lorsqu’il y a plusieurs déposants ou brevetés, la demande d’opt-out doit être déposée par tous les propriétaires (règle 5.1(a) des règles de procédure).
Si la personne présentant la demande d’opt-out au Greffe n’est pas le titulaire inscrit dans le registre de l’OEB ou les registres officiels des différents Etats membres contractants où le brevet européen produit effet, il est nécessaire que cette personne joigne à la demande d’opt-out une déclaration selon laquelle elle est bien propriétaire de la demande ou du brevet européen.
21/ Que se passe-t-il en cas d’erreur matérielle dans une demande d’opt-out ?
En cas d’erreur ou d’élément manquant dans une demande d’opt-out, une correction peut être déposée auprès du Greffe. La date d’inscription de la correction est notée dans le registre. L’opt-out est effectif à compter de la date de correction (règle 5.5 des règles de procédure).
22/ Qu’est-ce que l’opt-in ? Quel sont ses effets ?
Après avoir demandé un opt-out à l’égard d’un brevet européen sans effet unitaire ou d’une demande européenne publiée, il est possible de retirer cet opt-out, c’est-à-dire à replacer le brevet européen ou la demande européenne sous la compétence exclusive de la JUB. Durant la période transitoire les juridictions nationales peuvent toujours être saisies.
Ce retrait de l’opt-out, autrement appelé « opt-in » ou parfois « lock-in », ne prend effet qu’au moment de son inscription au registre européen des brevets et ne peut être accordé que si aucune action n’a été engagée devant une juridiction nationale (article 83.4 AJUB).
23/ Sera-t-il possible de faire un opt-in à tout moment pour que le brevet EP relève à nouveau de la compétence de la JUB ?
Oui, à la condition qu’aucune action n’a été engagée devant une juridiction nationale. Si c’est le cas, le brevet européen (ou la demande européenne) est « locked-out », c’est-à-dire définitivement placé hors de la compétence de la JUB (article 83.4 AJUB).
24/ Puis-je faire un nouvel opt-out après un opt-in ?
Non, il n’est pas possible d’échapper à la compétence exclusive de la JUB après avoir expressément demandé à y revenir. (règle 5.11 des règles de procédure)
25/ Qui peut représenter une partie devant la JUB ?
Une partie peut être représentée :
- soit par un avocat d’un des Etats membres contractants à l’AJUB,
- soit par un mandataire habilité à agir devant l’OEB (article 134 CBE) et possédant les qualifications appropriées (article 48.1 et 2 AJUB).
26/ Quelles sont les qualifications appropriées que doit posséder un mandataire OEB pour représenter une partie devant la JUB ?
Les qualifications appropriées sont définies par le Règlement sur le certificat européen dans le domaine du contentieux des brevets et autres qualifications appropriées (RCECB).
Les qualifications comprennent un « certificat européen dans le domaine du contentieux des brevets » qui devrait correspondre notamment au diplôme universitaire « Contentieux des brevets en Europe » du CEIPI. D’autres qualifications appropriées sont constituées par les diplômes de bachelier (NB : au sens de « bachelor ») ou de master en droit dans un Etat membre de l’Union européenne ou la réussite à un examen d’Etat équivalent en droit d’un tel Etat (règle 11 RCECB).
En outre, pendant une période transitoire d’un an à compter de l’entrée en vigueur de l’AJUB plusieurs formations/expériences seront reconnues comme faisant partie des qualifications appropriées requises (règle 12 RCECB). Font notamment partie de ces formations :
- le diplôme universitaire « Contentieux des Brevets en Europe » (couramment appelé « Patent Litigator ») déjà mentionné ci-avant, ainsi que
- le diplôme universitaire « Brevets d’invention » du Centre d’Études Internationales de la Propriété Intellectuelle (couramment appelé « CEIPI Brevets », qui est par ailleurs une condition pour pouvoir passer l’examen français de qualification).
L'inscription des mandataires en brevets européens sur la liste des représentants se fera auprès du Greffe de la JUB. L’inscription est définitive, y compris l'inscription faite dans la période transitoire d’un an mentionnée ci-avant (règle 16 RCECB).
27/ Une partie doit-elle obligatoirement être représentée devant la JUB ?
En règle générale la représentation est obligatoire (article 48 AJUB).
Quelques exceptions sont prévues pour que certaines procédures ne dépendent pas de ce régime, notamment pour :
- certaines procédures relatives aux décisions prises par l’OEB concernant notamment les demandes d’effet unitaire d’un brevet européen, les inscriptions ou les taxes annuelles pour un brevet unitaire ;
- les demandes d’opt-out et d’opt-in.
28/ Dans le cadre d’un contrat de licence : quelle partie est responsable du traitement des demandes de brevet européen à effet unitaire / de l’opt-out ?
Selon le règlement de procédure, seul le titulaire peut agir.
Ainsi, la demande d'effet unitaire doit être déposée par le titulaire (Art. 9(1)a) Reg(UE) 1257/2012), tout comme la déclaration d’opt-out (Règle 5.1 (Règl. proc.)) et la déclaration de retrait de l’opt-out (i.e. d’opt-in (Règle 5.7 (Règl. proc.)).
En outre, sur requête du titulaire du brevet, le brevet européen peut être limité par une modification des revendications (Art. 105bis CBE).
Toutefois, une clause organisationnelle peut être prévue par un contrat de licence (ou dans un avenant à un contrat existant). Dans ce cas, le licencié peut indiquer au titulaire ce qu’il veut, même si c’est le titulaire qui agit devant l’office.
Le contrat de licence peut ainsi prévoir que le licencié décidera de poursuivre ou non une demande de brevet et de choisir la forme sous laquelle cette demande sera validée après délivrance (brevet européen « classique » ou brevet européen à effet unitaire).
29/ Quels sont les éléments à prendre en considération lors de la conclusion d’une licence couvrant un brevet européen « classique » ou à effet unitaire ?
Lors de la conclusion de nouveaux contrats de licence ou la rédaction d’avenants à des contrats de licence déjà conclus, le donneur de licence et le licencié devront anticiper les droits et obligations liés au brevet « classique » ou à effet unitaire à l’aide de clauses spécifiques.
En particulier, le droit à l’information prévu par les textes pouvant ne pas être suffisamment sécurisant, il peut être prévu un accord (implicite ou explicite) du titulaire et/ou du licencié sur des actions à mener et les délais à respecter.
1/ L’étendue du droit concédé
Si un brevet à effet unitaire ne peut être limité, transféré, ou révoqué ou s’éteindre qu’à l’égard de tous les États membres participants, il peut faire l’objet d’un contrat de licence pour tout ou partie des territoires des Etats membres participants (Art. 3(2) Reg (UE) 1257/2012). La licence peut avoir un caractère exclusif ou non, étant observé qu’il est possible de concéder différentes licences exclusives sur un même brevet à effet unitaire (e.g. pour des Etats membres participants différents et/ou des activités différentes).
2/ Le droit d’agir
Sauf disposition contraire du contrat de licence, le titulaire d'une licence exclusive sur un brevet européen à effet unitaire a le droit de saisir la Cour dans les mêmes conditions que le titulaire du brevet, à condition que ce dernier en soit informé au préalable (art. 47.2 AJUB). Le titulaire d'une licence non exclusive sur un brevet européen à effet unitaire n'a, quant à lui, pas le droit d'intenter des actions devant le tribunal, à moins que le titulaire du brevet n'en soit informé au préalable et dans la mesure où cela est expressément autorisé par le contrat de licence (art. 47.3 AJUB). Ce droit à l’information pouvant, dans de nombreuses situations, ne pas être suffisamment sécurisant, il peut s’avérer utile de préciser certaines conditions, notamment en termes de délais, afin de laisser au titulaire ou au licencié le temps de réagir avant l’introduction d’une action.
Un brevet européen « classique » peut être invoqué dans une action engagée devant la JUB ou, durant une période transitoire de sept ans (éventuellement prolongée de la même durée), devant une juridiction nationale. Dès lors que le brevet est invoqué devant la JUB, le titulaire ne peut plus demander un opt-out. Si le brevet est invoqué devant une juridiction nationale, il ne peut plus l’être devant la JUB. Des clauses relatives à la juridiction et/ou à l’information relative à une juridiction choisie peuvent être utilisées pour éviter toute déconvenue. Il peut en être de même lorsque lorsqu’un brevet national et un brevet européen à effet unitaire coexistent.
Il est par ailleurs observé que la validité d'un brevet ne peut pas être contestée dans une action en contrefaçon intentée par le titulaire d'une licence lorsque le titulaire du brevet ne participe pas à la procédure (art. 47.5 AJUB). Des clauses particulières peuvent être prévues pour tenir compte de cette règle.
3/ Le droit national applicable et la juridiction nationale compétente
En tant qu’objet de propriété, le brevet européen à effet unitaire est assimilé, dans son intégralité et pour tous les Etats membres participants, à un brevet national d’un Etat membre participant déterminé selon le domicile, un établissement principal ou secondaire du déposant ou d’un co-déposant, selon l’ordre d’inscription des co-déposants au registre européen des brevets, ou, à défaut, à un brevet national de l’Etat dans lequel l’Organisation européenne des brevets a son siège (Art. 7 Reg(UE) 1257/2012).
La compétence d’une juridiction nationale suit un mécanisme similaire.
Il en résulte que l’ordre d’inscription des co-déposants au registre européen des brevets peut jouer un rôle particulièrement important. Des clauses particulières peuvent être prévues pour déterminer la droit national applicable et/ou la juridiction nationale compétente.
4/ La mise à jour du registre
Comme observé supra, certaines demandes telles qu’une demande d’opt-out sont soumises à un formalisme particulier, notamment en ce qui concerne le véritable titulaire et le titulaire officiellement inscrit. Il peut donc être envisagé de prévoir des clauses engageant la responsabilité du ou des titulaires vis-à-vis de certains actes afin que des actions puissent être valablement effectuées.